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Extrait Bouvard et Pécuchet

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LECTURES CLE EN FRANÇAIS FACILE

Bouvard et Pécuchet G u s tav e F l a u b e rt

NIVEAU 2

A2 1100 mots



LECTURES CLE EN FRANÇAIS FACILE

Bouvard et Pécuchet Gustave Flaubert

Adapté en français facile par Nicolas Gerrier


Crédits photographiques : Couverture : © BIS / Ph. Coll. Archives Larbor – DR Page 3 : Archivist © Adobestock

Direction éditoriale : Béatrice Rego Marketing : Thierry Lucas Édition : Marie-Charlotte Serio Couverture : Fernando San Martin Mise en page : Isabelle Vacher Illustrations : Conrado Giusti Enregistrement : Lumiiq © CLE International, 2023 ISBN : 978-209-035922-0

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Gustave Flaubert est né en 1821 à Rouen, en Normandie. À 15 ans, il est passionné d’écriture et de lecture. Il publie ses premières histoires dans une revue de sa région. Après son baccalauréat, il s’installe à Paris. Ses études de droit ne l’intéressent pas et il préfère fréquenter les milieux artistiques et littéraires. En 1844, une maladie l’oblige à abandonner ses études. Il s’installe avec ses parents dans une grande maison à Croisset en Normandie et se consacre à l’écriture. Il rencontre Charles Baudelaire, Victor Hugo et George Sand dans les salons parisiens. Ses nombreux voyages en France, en Italie et en Orient lui donnent de la matière pour ses romans. Il veut y décrire la vérité telle qu’elle est et il se documente énormément pour reconstituer la vie et la psychologie de ses personnages avec exactitude. Il se passe ainsi de nombreuses années entre les premières versions et les publications de Madame Bovary (18511856), Salammbô (1857-1862), L’Éducation sentimentale (1843-1869) ou encore La tentation de saint Antoine (18481874). Tout au long de sa vie, Gustave Flaubert écrit de nombreuses lettres. On connait aujourd’hui environ 4 480 lettres qu’il échange entre 1829 et 1880 avec sa famille, ses amis et d’autres écrivains. Il y explique ses visions de la vie, ses états d’âme, ses interrogations et des explications sur son travail. La fin de sa vie est marquée par ses problèmes ­– 3 –


de santé et d’argent. Il meurt à l’âge de 59 ans dans sa maison de Croisset. Gustave Flaubert commence la rédaction de Bouvard et Pécuchet en 1874. Il meurt six ans plus tard sans avoir terminé son écriture. Sa nièce publie le roman en 1881 en incluant les notes de l’auteur sur la fin de l’histoire. C’est l’histoire de la rencontre de deux inconnus qui deviennent amis, s’installent ensemble à la campagne et se lancent dans l’étude de nombreux domaines : agriculture, chimie, médecine, politique, philosophie, éducation … Les échecs répétitifs et le découragement entraineront les deux amis à abandonner leurs recherches et à reprendre leur premier travail. Avec ce livre, Flaubert critique ses contemporains qui pensent pouvoir tout savoir et maitriser. Il voulait soustitrer son roman « Encyclopédie de la bêtise humaine. »

Les mots ou expressions suivis d'un astérisque* dans le texte sont expliqués dans le Vocabulaire, page 58.

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1 CHAPITRE I Le bonheur à la campagne

I

l fait très chaud ce jour-là à Paris. Deux hommes

sont assis sur un banc du boulevard Bourdon. Le plus grand s’appelle Bouvard et le plus petit Pécuchet. – Oh, dit Pécuchet. Nous avons tous les deux écrit nos noms à l’intérieur de nos chapeaux. Ils ont de nombreux points communs. Ils sont copistes1, ils ont les mêmes opinions sur les gens, la politique, le théâtre, la religion et le commerce. De plus, ils vivent seuls : la femme de Bouvard est morte et Pécuchet n’est pas marié. Au moment de se dire au revoir, Bouvard dit : – Nous pouvons dîner ensemble ! Pendant le repas, ils parlent de médecine et de sciences. Ils sont du même avis : il y a tant de choses à découvrir, mais ils n’ont malheureusement pas le temps pour des recherches. Leur rencontre est une véritable aventure et, quelques jours plus tard, ils décident de se tutoyer2. Bouvard présente Pécuchet à l’un de ses amis, Barberou. Mais Pécuchet ne l’aime pas. À son tour, Pécuchet présente le professeur Dumouchel à Bouvard, mais Bouvard le trouve ennuyeux. Les deux nouveaux amis comprennent les remarques de l’autre et changent leurs habitudes. Bientôt, ils dinent tous les jours ensemble, parlent de tout et visitent de nombreux musées. Ils sont heureux, car leurs intelligences se développent. Mais une chose leur fait du mal : ils ne savent pas tout. 1. Un copiste : une personne qui écrit des textes dans un livre. 2. Se tutoyer : se dire « tu » et non pas « vous ».

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Leur travail et les conversations avec leurs collègues les ennuient de plus en plus. Le dimanche, ils marchent ensemble dans la campagne. Mais ils sont tristes le lendemain et ils arrêtent de se promener. Le 20 janvier 1839, Bouvard reçoit une lettre. Il court dire à Pécuchet : – Mon oncle est mort, il me laisse deux cent cinquante mille francs ! Nous pouvons vivre à la campagne. Les deux hommes s’imaginent se lever tôt et travailler dans leur jardin. Ils s’achètent des outils et choisissent les meubles et les livres à emporter. Ils hésitent pendant des mois sur la région où aller. Barberou trouve un château avec un grand jardin et une ferme de trente-huit hectares à Chavignolles dans le Calvados, entre Caen et Falaise. Elle vaut cent quarante-trois mille francs. Bouvard paye cent-vingt-mille francs et Pécuchet donne toutes ses économies3. Vers la fin du mois de mars 1841, Bouvard et Pécuchet arrivent avec toutes leurs affaires à Chavignolles. Un grand feu brûle dans la cheminée. Germaine, la vieille servante, a préparé une soupe, un poulet et des œufs durs. Le repas est excellent. La maison est en mauvais état, mais ils la regardent avec joie. – Nous y voilà, disent-ils. Quel bonheur ! C’est un rêve ! À minuit, ils font le tour du jardin et s’amusent à reconnaitre tous les légumes. – Tiens, des carottes. Ah, des choux ! Ils observent les bourgeons4 sur les arbres fruitiers et suivent les araignées. Ils se couchent ensuite chacun dans 3. Ses économies : l’argent qu’il a. 4. Un bourgeon : l’extrémité d’une plante avant l’apparition de la fleur ou du fruit.

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leur lit et discutent à travers la porte ouverte entre leurs deux chambres. Puis ils s’endorment et ronflent toute la nuit. Quelle joie de se réveiller le lendemain chez soi et à la campagne ! Ils admirent leur domaine depuis les fenêtres de leur chambre. Germaine leur apprend que les notables5 du village sont le docteur M. Vaucorbeil, le comte de Faverges, le maire M. Foureau, le notaire M. Marescot, l’abbé Jeufroy et Mme Bordin. Ils partent voir leur ferme à un kilomètre de la maison. Le fermier, maître Gouy, et sa femme leur font découvrir la propriété : les bâtiments ont besoin de réparations et les terres sont mauvaises pour les cultures. Ces critiques ennuient Bouvard, mais le plus important est leur jardin. Bouvard met un mouchoir sur la tête et Pécuchet sa casquette pour se protéger du soleil et ils se mettent au travail : Bouvard plante une pivoine et Pécuchet creuse un large trou pour faire son compost. Ils rêvent de tous les fruits et légumes qui pousseront bientôt dans leur jardin. Puis la neige et le froid arrivent. Ils s’installent dans la cuisine, discutent près du feu et regardent tomber la pluie. Lorsque les petit-pois et les asperges poussent, ils se sentent bons jardiniers et veulent devenir agriculteurs. La visite de l’exploitation du compte de Faverges les impressionne. Ils se mettent alors à lire des ouvrages sur le sujet et ils s’abonnent à un journal sur l’agriculture*. Puis ils s’achètent une cariole6 et vont dans des foires, habillés comme des paysans. Là, ils observent les animaux et interrogent les agriculteurs. Bientôt, ils renvoient maître Gouy, car ses méthodes ne sont pas les bonnes. Ils achètent 5. Un notable : une personne importante dans la vie publique. 6. Une cariole : une voiture tirée par des chevaux.

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les outils nécessaires ainsi que quatre chevaux, douze vaches, six porcs et cent soixante moutons et embauchent du personnel. Ils sont heureux et portent maintenant de gros sabots. Ils se lancent dans la culture du blé, mais leur technique et la météo conduisent à la catastrophe. De même les brocolis, les aubergines et les navets ne poussent pas bien ou les insectes les mangent. Un chou donne de l’espoir à Bouvard, mais il grandit trop et n’est pas mangeable. Il cultive alors des melons, se levant la nuit pour les protéger avec sa couverture. Mais, quand il faut les manger, ils sont mauvais et il les jette tous. Pécuchet se tourne vers les fleurs. Mais il plante au soleil celles qui ont besoin d’ombre et à l’ombre celles qui ont besoin de soleil. Ses expériences pour planter les arbres qui poussent dans les jardins de Paris sont une catastrophe. Il faut dire qu’il trouve dans les livres de Gasparin, Tull ou Beatson des conseils contradictoires7. Pour comprendre la météorologie*, les deux amis étudient les nuages grâce à la théorie de Luke-Howard. Mais leurs formes changent avant qu’ils trouvent leurs noms. Ils fabriquent leur propre thermomètre à l’aide d’une sangsue8 dans un bocal d’après la technique d’un prêtre de l’époque de Louis XV. Mais celui-ci ne donne jamais la bonne météo. Ils en fabriquent quatre qui donnent des indications différentes. Bouvard décide d’utiliser de l’engrais sur ses cultures. Ils versent sur ces terres de vieux poissons, des cadavres d’animaux et même de l’urine humaine. – C’est de l’or, dit-il à tout le monde. 7. Contradictoires : qui sont totalement différents. 8. Une sangsue : un ver qui boit le sang.

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Mais les céréales ne poussent pas et le blé a une mauvaise odeur. Ils n’ont pas de chance avec leurs animaux : les cochons mordent tout le monde, les bœufs et les moutons meurent, les poules se cassent les pattes. Bouvard fabrique sa propre bière et la donne aux paysans qui tombent tous malades. Pécuchet et lui la terminent le soir pour ne pas la jeter. Mais Germaine doit aller chercher le docteur, car eux-aussi ont très mal au ventre. L’année suivante, Bouvard sèche son blé en grandes meules dans les champs suivant la technique de ClapMayer. Mais, un soir, la cloche de l’église sonne avec force et un homme crie : – Le feu est chez vous ! Ils courent en haut de la colline et découvrent les meules de blé9 en feu. Trois cents personnes et le maire, M. Foureau, essayent de sauver le blé. Mais Bouvard ne veut pas détruire ses meules. – Il faut de l’eau, crie Bouvard. Où sont les pompiers ? – Nous n’en avons pas, répond le maire. – Ce qui arrive est de votre faute ! Bouvard est comme fou. Il accuse le maire de choses horribles et tout le monde admire le maire pour son calme. La chaleur est si forte qu’on ne peut pas approcher les meules. Il n’y a rien à faire. Bouvard pleure doucement. Mme Bordin essaye de le consoler. Pécuchet reste à l’écart sans pleurer. – Quel malheur, lui dit curé. Les autres villageois ne sont pas tristes. Les enfants dansent et les hommes parlent en souriant. L’un d’eux trouve même cela amusant. Lorsque le feu diminue, tout 9. Une meule de blé : un tas de blé.

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le monde s’en va. Mme Bordin et le curé raccompagnent les deux amis chez eux. Lorsqu’ils sont de nouveau seuls, Bouvard et Pécuchet cherchent la cause de l’incendie. Tout le monde pense que la paille est trop humide dans les meules, mais eux pensent à une vengeance. Mais de qui ? Les huit jours suivant, Pécuchet fait les comptes. Ils n’ont rien à vendre, ils n’ont pas d’argent à recevoir, et ils doivent trente-trois mille francs. Il n’y a qu’une solution : vendre le domaine. Le notaire va en parler à des personnes sérieuses. – Cela nous laisse du temps, dit Bouvard. Mais nous devons aussi faire des économies. – Ou bien nous pouvons nous lancer dans l’arboriculture*, dit Pécuchet. Cela rapporte beaucoup d’argent et ne demande pas de gros efforts. Ils cherchent dans les livres quels arbres ils doivent planter. Un pépiniériste leur vend trois cents plants dont il ne sait plus quoi faire. Six mois plus tard, les arbres sont morts. Ils en commandent alors de nouveaux. Au printemps, Pécuchet s’occupe des poiriers et des pêchers, mais il n’arrive pas à les tailler pour leur donner la bonne forme. Bouvard s’occupe des abricotiers et des cerisiers sans plus de succès. Pourtant, ils se lèvent à l’aube10 et travaillent jusqu’à la nuit. Quelques fruits réussissent à pousser. Malheureusement, un terrible orage éclate et détruit tout. – J’ai envie de me débarrasser de tout ça, dit Bouvard, pour nous installer ailleurs. Si on place l’argent en banque, au bout de quinze ans on aura plus d’argent et sans effort. 10. L’aube : les premières lumières de la journée.

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– L’arboriculture est peut-être bien une blague, dit Pécuchet. – Et l’agriculture aussi ! Ils trouvent dans la bibliothèque un livre écrit par M. Boitard, « L’Architecte des Jardins ». Les différents jardins les émerveillent. Ils créent alors un jardin unique : une cabane devient un temple chinois, un pont enjambe un bassin presque vide, un carré de plâtre représente un tombeau de l’époque romaine, de grosses pierres représentent des ruines. Pour le rendre plus beau encore, Pécuchet taille les arbres en forme de fauteuils ou de cerfs. Bouvard, lui, place cinq cents pipes11 dans la nature. Chacun est ému quand il découvre l’œuvre de l’autre et ils s’embrassent. – Il faut organiser un grand diner pour montrer cela, dit Bouvard. – Attention, dit Pécuchet, les diners coutent très cher. Tous les notables de Chavignolles acceptent l’invitation sauf le comte de Faverges qui est à Paris pour ses affaires. Bouvard et Pécuchet font les choses en grand et c’est l’aubergiste du village, M. Beljambe, qui prépare les plats. Malheureusement, les huitres sentent la vase et les vins ne sont pas à la hauteur. Après le champagne, les deux amis font découvrir le jardin à leurs invités. Leur étonnement rend heureux Bouvard et Pécuchet. Mais les invités se mettent à critiquer puis à rire quand ils découvrent les pipes de Bouvard. Tout à coup, un homme crie depuis la rue. – Donnez-moi un verre de vin.

11. Une pipe : un objet qui sert à fumer.

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C’est Gorju, un ancien menuisier. Le maire et le curé veulent le faire partir, mais Bouvard va chercher une bouteille. Gorju boit et s’en va. Les invités critiquent Bouvard, car son geste favorise le désordre. Bouvard défend alors le peuple et chacun à son opinion sur tout : Foureau félicite le gouvernement, le curé trouve qu’on ne protège pas la religion, Pécuchet attaque les impôts, le docteur est pour le progrès, Mme Bordin déteste la république… Bouvard et Pécuchet sont déçus, car les invités n’ont aimé ni le repas ni le jardin. Ils décident de ne plus voir personne. Ils passent alors leur temps à mettre des légumes, des œufs, de la viande et du poisson dans des bocaux et des boites de conserve. Mais, quelques mois plus tard, les tomates et les petits pois sont pourris et il y a une odeur horrible dans toutes les boites. – Le problème, dit Pécuchet, c’est que nous ne connaissons pas la chimie.

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LECTURES CLE EN FRANÇAIS FACILE

BOU VAR D E T PÉCUC HE T Gustave Flauber t Ce roman raconte l’histoire de deux amis, Bouvard et Pécuchet, qui quittent leur emploi pour se consacrer à l’étude. Ils s’essayent à différents domaines, mais échouent à chaque fois. Cette satire sombre et ironique de l’ambition démesurée et de l’ignorance de la société de l’époque souligne la vision pessimiste de Flaubert sur la nature humaine. MOTS

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ISBN 978-209-035922-0

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