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Jean-Luc Romero

Conseiller régional d'Ile de France
  Conseiller régional d’Ile de France Président d’honneur du parti « Aujourd’hui, Autrement » Président de l’ADMD Président d’ELCS (Elus locaux contre le sida)
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 En 1987, j’apprends ma séropositivité au retour d’un voyage en Afrique du Sud. J’ai 28 ans, le monde s’écroule.

Les années qui suivirent, je me suis engagé sur énormément de fronts, tant politiques qu’associatifs. Je me suis littéralement noyé dans le travail. 

En quelques lignes, j’ai d’abord été assistant parlementaire, puis secrétaire national de l’UMP et du Parti radical. J’ai également été élu Conseiller municipal de Bobigny de 1989 à 2001 et membre du Conseil Régional d’Ile de France depuis 1998.

En 1995, je fonde et préside Elus Locaux contre le Sida (ELCS) et en 2004, je crée le parti « Aujourd’hui, Autrement » dont je suis toujours le Président d’honneur.

Je suis également vice-Président du CRIPS Ile-de-France depuis 1998 et Président bénévole d’ADMD, association pour le droit à mourir dans la dignité depuis juin 2007.

En 2002, je suis donc séropositif depuis 15 ans.

Plus les années passent et plus je m’engage dans la lutte -les luttes devrais-je plutôt dire- contre le sida et toutes les discriminations inhérentes à cette maladie.

Au fil des ans, je sens croître en moi la volonté de mettre mes actes en conformité avec mes mots. En effet, je ne cesse de me battre pour améliorer la vie des séropositifs, je n’arrête pas de dire que ce n’est pas une maladie honteuse dont il ne faudrait surtout pas faire un tabou. Mais moi je ne parle pas, je ne donne pas l’exemple, je garde pour moi ce lourd secret qui me pèse chaque jour davantage. Je sens donc qu’il est temps que je m’exprime, cela devient fondamental, je ne peux plus vivre dans cette duplicité-là. J’ai besoin de donner  -encore plus- de crédit à mon discours.

La plupart de mes amis m’en dissuade. Ils disent que je risque beaucoup, notamment sur un plan politique. On me conseille donc de me taire si je ne veux pas être lâché voire lynché…

Il faut dire qu’aucune personnalité politique n’a encore jamais fait une telle annonce. Dire aussi qu’à l’époque le sida, hélas, commençait déjà à « passer de mode ». Les médias comme les politiques n’en faisaient plus une priorité. Ainsi donc, on ne parlait plus beaucoup de souffrance, d’exclusion, de solitude, de précarité ni même de mort.  Non, ce qu’on mettait surtout en avant, c’était la réussite des thérapies, traitements qui tendaient à faire croire qu’on pouvait désormais bien vivre avec le sida. Le résultat de ces discours ne se fit pas attendre : relâchement des comportements et hausse sensible des contaminations.

C’est donc un ensemble de paramètres qui va m’amener à révéler publiquement ma séropositivité : besoin de soulager ma conscience, d’être en adéquation avec mes convictions et volonté de témoigner de manière retentissante pour alerter l’opinion publique sur les  nombreuses difficultés auxquelles on est quotidiennement confronté lorsqu’on est séropositif ou malade. Ce qui n’est pas du tout la même chose puisque je rappelle qu’on n’est pas malade lorsqu’on est séropositif : on porte le virus en soi sans que la maladie ne se soit déclarée.

La révélation de ma séropositivité se passera de la manière suivante :

L’association AIDES organise une réunion à la cité de la Villette autour du thème des personnes vivant avec le virus du sida. Je suis convié à cette réunion, Simone Veil aussi, et je suis très heureux qu’elle soit à mes côtés lorsque je vais révéler à l’assistance ma séropositivité. C’est très important qu’une telle personnalité dotée de cette aura-là soit avec moi en ce jour si particulier.

Ce fut un moment très fort et vraiment violent d’enfin réussir à lâcher cette « bombe ».

Je dus réunir toutes mes forces et tout mon courage pour oser parler devant cette salle bondée. Mais je l’ai fait, j’y suis parvenu. Je me souviens que le contrecoup fut si fort qu’après, tout seul dans le fond de la salle, je me mis à pleurer, à sangloter longuement. Par mes larmes je libérais quinze ans de silence.

Conjointement au colloque d’AIDES, sortira mon livre « Virus de vie », livre retraçant mon parcours. J’enverrais  l’ouvrage à toute la classe politique mais comme attendu je n’aurais pratiquement aucun retour, à de rares exceptions près comme Bertrand Delanoë ou Alain Juppé. Pour le reste, RAS, on continue à faire comme si de rien n’était dans un silence aussi contrit et gêné…

En 2002, je fus le premier homme politique au monde à révéler sa séropositivité.

Depuis, je suis devenu une sorte d’étendard, de porte drapeau. Je le comprends bien sûr mais je le déplore tout de même car je me sens souvent un peu isolé dans ma démarche et dans les luttes qui sont les miennes.

En 2007, je vais décider de privilégier l’associatif et l’humanitaire.

Je reste et resterai un passionné de politique, certes. Mais de politique au sens noble et premier du terme. Tout le reste -les mesquineries, les coups bas, les batailles d’intérêt, les ego…- bref, ce qu’on pourrait appeler « la politique politicienne », non merci, je n’en veux plus, j’en ai largement fait le tour.

Je vais rentrer comme simples adhérents à l’ADMD -association pour le droit à mourir dans la dignité- avant d’en devenir le vice-Président puis le Président. L’ADMD compte aujourd’hui 46 000 membres.

Le lien entre le sida et l’ADMD est aussi logique qu’évident : Etre séropositif, c’est bien entendu penser à son avenir et s’inquiéter de la manière dont on pourra choisir de finir sa vie.

En ce sens, je crois qu’il faut proposer un vrai débat, une profonde réflexion sur la prise en charge de la fin de vie. Je milite pour qu’on puisse choisir la manière dont on veut mourir.

Je ne prône pas l’euthanasie envers et contre tout,  je défends le choix, ce n’est pas la même chose.

A mon sens, il faudrait une loi républicaine et laïque dans notre pays, égalité et solidarité pour tous. Tenir compte de l’avis de chacun c’est respecter tout le monde. Il en va également d’une question de dignité fondamentale.

J’estime que la France est en retard sur ces problématiques-là. D’autres pays l’ont fait comme la Belgique et la Hollande. Même la très catholique Espagne a engagé un débat qui pourrait l’y conduire.

Et puis il ne faut pas être hypocrite, nous savons très bien que certains médecins ont déjà aidé de nombreux malades à partir en douceur. Ce n’est peut être pas une pratique courante, mais elle existe. Avec tous les risques qu’encourt le corps médical en bravant ainsi l’interdit.

Voilà pourquoi il faut que le débat ait lieu, un débat serein et dépassionné autant que faire se peut. C’est à mon sens une vraie question de société. Et une priorité.

L’ADMD a proposé un texte de loi qui a été envoyé à tous les parlementaires. Un tiers d’entre y a répondu favorablement.

Une mission menée par le député Léonetti est chargée d’évaluer cette loi sur la fin de vie. Elle rendra ses conclusions en novembre 2008.

Quant à nous, nous allons organiser la première journée mondiale pour le droit à mourir dans la dignité. Elle aura lieu à Paris, au Trocadéro, le 2 novembre 2008, avec des acteurs engagés venus du monde entier.

Que ce soit sur le front du sida ou de la prise en charge de la fin de vie, il faut continuer à se battre, à se mobiliser, toujours et encore.

C’est difficile, éprouvant, parfois un peu désespérant mais je pense que c’est le meilleur moyen de faire évoluer les mentalités.

Je crois en la mobilisation générale et en l’implication de chacun. Tous ensemble nous pouvons former une véritable chaîne de solidarité. Et c’est grâce à chaîne-là que nous réussirons à ouvrir les cœurs et les consciences.

Le discours pourra sembler quelque peu utopiste mais je ne pense pas qu’il le soit, bien au contraire. Tout ce que je vis chaque jour sur le terrain entouré de ceux qui se battent à mes côtés en atteste.

Et puis ces combats que je mène depuis tant d’années vont dans le sens de l’Histoire.

Tout autour de nous, les sociétés évoluent et s’humanisent. Pourquoi notre bonne vieille France resterait-elle à la traîne ? Les choses seront peut être plus longues et difficiles à obtenir mais nous y arriverons, j’en suis convaincu.

Il n’y a pas de fatalité. Ni par rapport au sida ni pour la prise en charge de la fin de vie.

Se battre, agir, communiquer, faire reculer l’ignorance, les peurs et les tabous…Il reste encore tant à faire. Sur certains sujets, nous avançons. Sur d’autres en revanche -je pense ici au quotidien des séropositifs et des malades- j’estime que la situation ne s’améliore pas du tout. Et ceci ne vaut pas que pour la France, non. Mais par exemple pour tous les pays qui refusent aux séropositifs le droit d’entrer sur leur territoire. C’est une honte, les êtres ne peuvent même plus s’aimer librement et construire leur vie comme ils le souhaiteraient. Même chose pour les compagnies d’assurance qui refusent d’assurer les séropositifs ou les banques qui ne veulent pas prêter d’argent. Comment vit-on dans une société dans laquelle on ne peut ni circuler librement ni construire son avenir ? Comme si la douleur de se savoir malade ou séropositif n’était déjà assez lourde à porter…

Il faut dénoncer tout cela. Et se battre pour essayer de faire évoluer les choses dans le bon sens. C’est en tous les cas le sens de ma vie.

Le sens de mes engagements de vie…

 

 

2 commentaires
1739 Lu

Battons nous!

par Virginie Selvini | 27-09-2008

Ne baissez pas les bras, il ya encore beaucoup de chemin à parcourir pour que la séropositivité ne soit plus taboue. Bravo pour votre courage.

engagement

par brigitte pouyoul khayat | 24-09-2008

emouvant, mais aussi pleins de promesse pour gagner des batailles non seulement sur la maladie (sida ou autres) mais aussi sur l'accompagnement , tant sur le plan de la santé que sur les choses de la vie : travail, logement etc..