Argument du bien commun du tout
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Cet argument répandu soutient que le mal souffert par les parties du tout de l'univers contribue à un plus grand bien de l'ensemble, qui ne pourrait exister sans ces maux de certaines parties. Par exemple la maladie contribue au développement de tout un ensemble de vertus, comme le courage et la compassion.
Dans cette vision développée par des mythes anciens tournant autour du Christianisme et d'interprétations tardives des chapitres 2 et 3 de la Genèse, Dieu veut le bien de l'homme. La révolte de Satan, créé par Dieu, est à l'origine de tout le mal dans l'être humain.
Quant aux catastrophes naturelles (tremblement de terre…), aux maladies (sida, cancer, peste…), à la mort, elles sont dues au fait que la Nature a été laissée à elle-même à partir du premier péché humain commis à l'instigation de Satan : la Nature est maudite à cause de toi.
« Il dit à l'homme : Puisque tu as écouté la voix de ta femme, et que tu as mangé de l'arbre au sujet duquel je t'avais donné cet ordre : Tu n'en mangeras point ! le sol sera maudit à cause de toi. C'est à force de peine que tu en tireras ta nourriture tous les jours de ta vie, il te produira des épines et des ronces, et tu mangeras de l'herbe des champs. »
— Gn 3:17-18 (Louis Segond)
Utilisant sa liberté d'action pour rejeter les ordres donnés par Dieu sur son comportement dans la Création[5], le premier homme se retrouve mortel et seul au sein d'une nature laissée à elle-même.
L'homme doit alors faire appel à Dieu pour lutter contre les maux moraux, existentiels et naturels qu'il a introduit en lui et dans la nature par sa désobéissance.
Réfutation de l'argument satanique
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La réfutation considère cet argument comme contradictoire avec la notion d'un dieu créateur de tout : si Dieu a tout créé, il a aussi créé Satan. Cause ultime de tout, il est aussi la cause ultime du mal.
À cette réfutation les tenants de l'argument satanique en opposent une autre : Dieu a créé Lucifer, le « porteur de lumière ». Et c'est Lucifer qui est devenu volontairement le diable, « celui qui divise ». Dieu l'a créé en lui donnant par amour, à la fois toute liberté d'agir et toute science de la conséquence de ses actes (« porteur de la Lumière »).
Dieu n'est donc pas selon eux, la cause ultime du mal mais c'est Lucifer qui, faisant naître le mal, crée une division dans la Création en se séparant de Dieu, source de tout amour.[réf. nécessaire]
Selon les philosophes partisans de la théodicée de l'harmonie cachée, le mal que nous constatons ne serait apparence de mal qu'à nos yeux alors qu'il est en réalité un bien.
Aux yeux du profane, l'Histoire apparaît comme une suite de civilisations dont beaucoup ont sombré. Hegel, pour sa part, y voit la manifestation de l'Esprit qui peu à peu prend conscience de lui-même en s'incarnant successivement dans ces civilisations. L'Histoire accouche, dans le fer et le sang, mais aussi par les échanges, du Savoir Absolu, c’est-à-dire de l'Esprit (de Dieu) qui se contemple lui-même et prend conscience qu'il est l'Histoire.
Ainsi, l'Esprit connaîtrait la justification cachée des malheurs existant sur Terre, invisible et incompréhensible par les humains non au fait de la science spéculative. De même pour un savant pré-Kantien, recherchant les harmonies cachées de la Nature au moyen du langage mathématique.
Caractère non démontrable de l'argument de l'harmonie cachée
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Cette théodicée ne donne pas d'explication de l'existence du mal, mais se contente d'affirmer qu'il en existe une ; connue seulement de Dieu, elle peut faire l'objet d'une recherche par l'humain : Teilhard de Chardin, en supposant la convergence de l'humanité vers ce qu'il nomme « point Oméga », ne justifie en rien le mal inhérent au mécanisme de l'évolution, mais suggère que ce mal est sans commune mesure avec le résultat qui en surviendra. Cette vision fut désapprouvée par Rome de son vivant même, en tant que confondant trop biologie évolutive et théologie surnaturelle. Cette théodicée, bien que fournissant une explication hypothétique, répond toutefois à l'autre hypothèse qui soutient l'absence d'explication.
Selon la philosophie hindouiste et bouddhiste, l'être spirituel animant temporairement l'être humain se réincarne continuellement et vit de multiples vies successives dans le but de prendre suffisamment conscience de sa nature spirituelle pour devenir capable de se dégager du cycle des naissances et des morts. Le mal vécu dans une vie est alors la résultante, la conséquence des actes de vies passées, afin de permettre à l'esprit de l'homme de s'éveiller. Certains courants voient ce mal conséquent comme une « punition » et font du karma (la somme des actes passés) quelque chose de négatif. Sa véritable signification serait toutefois plus mécaniste et constituerait le contrepoids automatique, systématique que représente le passé d'un être spirituel sur sa présente incarnation et qui doit au bout du compte lui permettre, un jour ou l'autre, de se décider à l'éveil spirituel.
Caractère non démontrable de l'argument du karma
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Cette théodicée ne donne pas de moyen d'être vérifiée, mais se contente d'affirmer qu'il en est ainsi, devenant ainsi une affaire de croyance.
Selon les théologiens partisans de la théodicée de la discipline, le mal est envoyé par Dieu pour punir les pécheurs, ou pour tester la fidélité des croyants.
Réfutation de l'argument de la discipline
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Cette vision du Créateur est en contradiction avec l'hypothèse de départ de sa bienveillance. En outre, elle n'explique pas le mal touchant les innocents (par exemple, un bébé assassiné) et reste muette face aux crimes impunis. D'où l'argument de l'harmonie cachée ou eschatologique.
Selon les philosophes partisans de la théodicée eschatologique, l'existence du mal ne s'explique que par la présence d'une récompense à la fin du procès. Ainsi pour Hegel nous parviendrons au Savoir Absolu.
Réfutation de l'argument eschatologique
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On pourrait dire que l'argument du « tout est bien qui finit bien » se réfute en indiquant que l'existence d'une récompense finale n'excuse pas le mal ayant précédé cette récompense.
En revanche, si l'eschatologie implique le châtiment du mal, il s'agit d'un bien. Et si la récompense finale est d'un autre ordre, infini, il y a surcompensation (infinie).
Selon les philosophes partisans de la théodicée ontologique, la création d'un univers complexe et infiniment diversifié ne peut se faire sans défauts. Sans ces défauts, l'univers serait Dieu lui-même. Malgré l'existence obligatoire de ce mal, la majorité des phénomènes de l'univers sont optimaux et nous vivons dans le meilleur des mondes possibles.
Caractère injustifiable de l'argument ontologique
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Si ce monde est le meilleur des mondes possibles alors que penser de la nature du paradis ? Si l'existence du bonheur exige l'existence du malheur, et que les deux sont indissociablement liés, ne doit-on pas conclure qu'au Paradis, il n'existe ni l'un ni l'autre, ou bien, comme sur terre, les deux ?
Toutefois, on pourrait considérer le Paradis et l'Enfer comme la séparation du bien et du mal qui coexistent dans le monde matériel (le nôtre). L'argument ontologique demeure ainsi intact. Ce qui est aussi digne d'être remarqué avec cet argument est le fait qu'il respecte l'idée de théosis faisant de l'union à Dieu le bonheur absolu des Hommes.
Selon les philosophes partisans du libre arbitre (saint Augustin, saint Thomas d'Aquin, Leibniz), l'être humain a la capacité de choisir ses actions et de connaître les conséquences de ses actes. Nous sommes des êtres libres de tout déterminisme et cette liberté implique la capacité de choisir de faire le bien ou le mal. L'éventualité du mal est donc la contrepartie nécessaire de la liberté octroyée par Dieu.
Toutes les théodicées répondent à l'objection que l'humanité subit le mal injustement, d'où les remises en cause des attributs de bonté ou de toute-puissance de Dieu et le rôle implicite de victime de l'être humain. Mais si la Terre est l'Enfer où sont envoyés les criminels que Dieu veut punir, le mal est alors un juste châtiment infligé à des êtres qui le méritent.