Valeur universelle exceptionnelle
Brève synthèse
La vieille ville de Lamu, située sur l’île du même nom proche de la côte Est de l’Afrique, à environ 350 km au nord de Mombasa, est le plus ancien et le mieux préservé des lieux de peuplement swahilis d’Afrique orientale.
Avec son centre historique de 16 hectares qui comporte de nombreux édifices, Lamu a conservé son intégrité sociale et culturelle ; elle a également maintenu l’authenticité de son tissu urbain jusqu’à nos jours. Autrefois principal centre commerçant d’Afrique de l’Est, Lamu a exercé une importante influence sur toute la région en matière d’érudition religieuse et culturelle et de compétences techniques. Société étroitement soudée et d’esprit conservateur, Lamu a gardé son rôle éminent de haut lieu d’éducation de la culture islamique et swahilie, comme en témoignent sa fête religieuse annuelle de Maulidi et ses festivals culturels.
Contrairement à d’autres foyers d’implantation swahilis peu à peu abandonnés le long de la côte Est de l’Afrique, Lamu est habitée en permanence depuis plus de 700 ans.
L’expansion et le déclin des ports maritimes sur la côte d’Afrique de l’Est et les interactions entre Bantous, Arabes, Perses, Indiens et Européens représentent une phase culturelle et économique importante de l’histoire de la région, qui trouve son expression la plus remarquable dans la vieille ville de Lamu, son architecture et son urbanisme.
La ville se caractérise par ses rues étroites et ses magnifiques maisons de pierre aux imposantes portes arrondies, inspirées par la fusion unique de styles de constructions swahilis, arabes, perses, indiens et européens. Les édifices du front de mer, avec leurs arcades et leurs vérandas ouvertes, donnent une impression visuelle uniforme de la ville depuis la mer. Quant aux bâtiments de style vernaculaire ils sont décorés à l’intérieur de plafonds peints, de grandes niches (madaka), de petites niches (zidaka), et de porcelaines de Chine. Les bâtiments sont bien préservés et témoignent d’une longue histoire retraçant le développement des techniques de construction swahilies qui utilisent le corail, la chaux et le bois de palétuvier.
L’architecture et la structure urbaine de Lamu montrent de manière vivante les influences culturelles d’Europe, d’Arabie et de l’Inde qui s’y sont mêlées pendant plus de 700 ans, recourant aux techniques swahilies traditionnelles pour produire une culture originale. Le bien se caractérise par son architecture swahilie unique par son organisation spatiale et ses ruelles tortueuses. Ce tracé des rues en labyrinthe s’inspire des traditions arabes de distribution du sol et d’aménagement urbain. L’urbanisme local se définit aussi par ses groupes d’habitations divisées en petits quartiers (mitaa) comprenant chacun des bâtiments regroupant plusieurs lignées de parents d’une même famille.
Considérée par d’éminents chercheurs swahilis comme le berceau de la civilisation swahilie, Lamu est devenue un important centre religieux pour l’Afrique Orientale et Centrale depuis le XIXe siècle, et un pôle d’attraction pour les spécialistes de la religion islamique et de la culture swahilie. C’est aujourd’hui un haut lieu de culture swahilie dont Les habitants ont su maintenir leurs valeurs traditionnelles caractérisées par le sens de l’unité et de la cohésion sociale.
Critère (ii) :L’architecture et la structure urbaine de Lamu démontrent de manière vivante les influences culturelles venues d’Europe, d’Arabie et d’Inde qui s’y sont mêlées pendant plusieurs siècles, utilisant les techniques swahilies traditionnelles pour donner naissance à une culture bien distincte.
Critère (iv) :L’expansion et le déclin des ports maritimes sur la côte d’Afrique de l’Est et les interactions entre Bantous, Arabes, Perses, Indiens et Européens représentent une phase culturelle et économique importante de l’histoire de la région, qui trouve son expression la plus remarquable dans la Vieille ville de Lamu.
Critère (vi) :Son rôle prépondérant de pôle commercial et l’attrait qu’elle présentait pour les érudits et les professeurs conféra à Lamu une importante fonction religieuse (comme en témoignent le Maulidi annuel et les festivals culturels de Lamu) en Afrique Orientale et Centrale. La ville demeure un important centre d’éducation de la culture islamique et swahilie.
Intégrité
Le bien, qui couvre 16 hectares, intègre comme il convient tous les éléments matériels et immatériels représentatifs de sa valeur universelle exceptionnelle. Un important pourcentage (65 %) des structures matérielles est en bon état ; 20 % seulement des bâtiments exigent une rénovation mineure ; les 15 % restants pourraient nécessiter une restauration totale. La plupart des bâtiments de la ville sont toujours utilisés.
La ville doit maintenir ses relations avec le paysage environnant. Le cadre de la vieille ville est vulnérable aux empiétements et aux aménagements illégaux sur les dunes de Shela qui constituent un élément capital de son environnement. Le développement représente une menace pour l’intégrité visuelle de Lamu, ville insulaire étroitement liée à la mer et aux dunes de sable, ainsi que pour sa sauvegarde à long terme car ces dunes de sable constituent sa principale source d’approvisionnement en eau douce. L’environnement de la ville comprend aussi les îles voisines – qu’il faut toutes protéger contre des installations illégales –, ainsi que les mangroves qui abritent le port.
Authenticité
L’architecture de Lamu a utilisé des matériaux disponibles sur place et des techniques qui sont encore utilisées. La population de Lamu a su conserver des traditions séculaires qui ont renforcé son sens de l’appartenance et de la cohésion sociale. Le plan de la ville en témoigne avec ses nombreux espaces sociaux tels que les porches (daka), places publiques et lieux de détente (barazas) sur le front de mer. La ville demeure un important centre d’éducation de la culture islamique et swahilie.
L’authenticité de la vieille ville est menacée par le développement et l’absence d’infrastructures adaptées, qui pourraient avoir un effet néfaste pour les constructions et espaces publics sensibles et relativement fragiles qui donnent à la ville son caractère profondément original.
Eléments requis en matière de protection et de gestion
La Vieille ville de Lamu est administrée selon la loi de 2006 sur les musées nationaux et le patrimoine (qui remplace la loi CAP 216 de 1983 sur les musées nationaux et la loi CAP 215 sur les antiquités et les monuments) et selon la loi sur les collectivités locales (et ses arrêtés connexes). Les constructions et aménagements sont également régis par l’EMCA (loi sur la coordination de la gestion de l’environnement) et la loi de 2006 sur l’aménagement du territoire, qui reconnaît l’importance de l’étude des vestiges archéologiques. La vieille ville possède une zone tampon classée qui inclut le paysage de mangrove de Manda et Ras Kitau et les dunes de sable de Shela, également respectivement protégés par la législation sur les forêts et la législation sur l’eau (bien que la zone tampon n’ait pas été officiellement approuvée par le Comité du patrimoine mondial). Tous les éléments constitutifs du bien bénéficient donc d’une protection juridique.
Le Bureau de Conservation de la Ville de pierre de Lamu, maintenant renommé Bureau du Site du patrimoine mondial de Lamu et de la Conservation, a été créé par les Musées nationaux du Kenya et est opérationnel depuis 1986. Un responsable de la conservation est détaché auprès de la mairie de Lamu pour donner des avis en matière de conservation. Une Commission de planification, créée en 1991, est chargée de la supervision et traite les nouveaux problèmes de conservation.
Il existe un plan de conservation de la Vieille ville de Lamu qui aide à trouver l’équilibre entre besoins communautaires de développement et maintien des valeurs architecturales de la ville. Le bien est en bon état de conservation. Des institutions locales veillent à ce que Lamu conserve aussi son importance de centre d’éducation culturelle et de pratiques islamiques et swahilies.
Un projet de plan de gestion a été établi pour traiter certains problèmes comme l’expansion spectaculaire d’installations officieuses dans le bien, les empiétements et aménagements illégaux sur le captage d’eau des dunes de sable, le projet de port et de mouillage de bateaux de croisière, et la prospection pétrolière. Ce plan va aussi renforcer les relations interministérielles en vue de favoriser la mise en place d’une politique de gestion intégrée, avec création d’un fonds pour assurer la conservation et la gestion durables du bien.