Les pilotes d'Air France demandent une rallonge salariale
Alors que les négociations sur le lancement d'une filiale low-cost de la compagnie nationale n'ont pas encore abouti, le principal syndicat de pilotes demande une augmentation générale des rémunérations. De quoi gripper les discussions.
Le climat social d’Air France ressemble à s’y méprendre à celui du mois de mars. Les giboulées peuvent succéder aux rayons de soleil. Jeudi, dans un courrier interne, la compagnie se félicitait d’avoir enfin trouvé un accord avec ses pilotes sur l’une de ses filiales, Transavia. Cette compagnie, dont les avions arborent un logo vert menthe, propose des vols à bas coût en Europe et sur le bassin méditerranéen. Elle permet ainsi à Air France de limiter l’évaporation de ses voyageurs sur ces destinations.
L’embellie n’aura été cependant que de courte durée. Selon les informations obtenues par Libération, le Syndicat national des pilotes de lignes (SNPL), la principale organisation de navigants, a transmis en début de semaine une proposition d’accord salarial à la direction. Visiblement, le document a fait sérieusement tousser ceux à qui il était destiné. Il comporte, en effet, une demande d’augmentation de salaire de l’ordre de 12 % sur trois ans.
Selon la direction, ce coup de pouce sur les rémunérations (plus quelques avantages en nature, comme des jours de repos supplémentaires) se traduirait par une augmentation de la masse salariale des pilotes de 130 millions d’euros en trois ans, jusqu’en 2020. Puis, de 130 millions par an, à partir de cette date. «L’équilibre d’un accord n’exclut pas des augmentations de salaire», justifie la secrétaire générale du SNPL, Véronique Damon.
Productivité
Les pilotes ont en fait joué de deux arguments pour légitimer leur demande. D’abord, les salariés basés au sol ont obtenu une augmentation de 2,1 % au titre de la négociation annuelle obligatoire sur les salaires (NAO). Ensuite, les gratifications accordées aux membres du comité exécutif ont fuité à l’issue d’un comité d’entreprise tenu le 22 février. Dans un premier temps, l’augmentation du bonus accordé à l’équipe dirigeante apparaissait à hauteur de 40 % avant qu’elle ne soit présentée comptablement de manière différente. Elle demeure néanmoins de 17,6 %.
Dans ce contexte, les pilotes réclament leur part du gâteau, d’autant que les derniers résultats affichés par Air France sont en progression. Le résultat net a progressé de 674 millions d’euros l’an dernier. La réclamation, un peu inattendue des navigants, ne fait pas vraiment les affaires du PDG de la compagnie, Jean-Marc Janaillac. Ses équipes tentent depuis des mois d’obtenir un accord sur la hausse de la productivité des pilotes. En clair, la direction souhaite les faire voler plus en les payant de manière identique, alors qu’une partie de leur fiche de paie dépend du nombre d’heures de vol réalisées.
Perplexité
La situation risque d’autant plus de se tendre que l’horloge tourne en faveur des syndicats de pilotes. Le lancement de la future compagnie low-cost long courrier d’Air France (dont le nom de code est «Boost»), annoncé il y a cinq mois, passe d’abord par un accord avec ceux qui sont assis dans les cockpits. Or, si d’ici à quinze jours rien n’est signé, l’échéance d’octobre 2017 retenue pour le premier vol aura le plus grand mal à être tenue. Ce qui, commercialement, serait du plus mauvais effet.
En privé, Jean-Marc Janaillac ne cache guère sa perplexité face à des pilotes dont la base s’est déclarée, par référendum, favorable au lancement de cette compagnie à bas coût, alors que les instances représentatives donnent l’impression d’y être opposées. Après neuf mois à la tête de la compagnie nationale, voilà son patron pleinement confronté au charme discret de la négociation sociale chez Air France.
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