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    UE

    Livre de Piketty : un coup éditorial et politique motivé par une «urgence démocratique»

    Par Sonya Faure et Cécile Daumas, photo Diego Ravier (Hans Lucas)
    Lors du déplacement de Benoît Hamon à Bruxelles, mardi.
    Lors du déplacement de Benoît Hamon à Bruxelles, mardi. Photos Diego Ravier. Hans Lucas pour Libération

    Rédigé en un mois, édité en dix jours, le traité alternatif a pour ambition première de prouver la possibilité d’une Europe plus sociale.

    Tout s’est passé très vite au lendemain de la primaire de gauche, quand Benoît Hamon a confié à l’économiste désormais mondialement connu pour son livre le Capital au XXIe siècle (Seuil) le volet Europe de son projet présidentiel. Piketty s’entoure alors d’une professeure de droit public, Stéphanie Hennette-Vauchez, et de deux politologues spécialistes des institutions européennes, Guillaume Sacriste et Antoine Vauchez, pour traduire en langage juridique «européen» une idée fixe qu’il nourrit depuis des années : démocratiser la zone euro. «C’est eux qui ont écrit ce traité de démocratisation de l’Europe, dit l’économiste. C’est important de montrer qu’il s’agit d’un travail collectif, la crédibilité juridique me paraît fondamentale car le projet européen est fondé sur le droit.» Enseignante à Paris-Nanterre, Stéphanie Hennette-Vauchez s’amuse encore de la performance. «On s’est pris au jeu et on a fait un traité en un mois.»

    «Ineptie»

    Derrière l’aridité des «prenant acte» et autres «considérant» (inévitables canons du genre), dans les interstices de la litanie des articles, se glisse une ambition : montrer qu’il est possible de toucher aux traités européens existants. Un «coup politique», résume Stéphanie Hennette-Vauchez. Mené par des intellectuels qui, par «urgence démocratique», se sont mis au service de Benoît Hamon.«Le droit est-il un sport de combat ?» se demandent les auteurs dans leur texte introduisant le traité. Comme dans l’aïkido, expliquent-ils, pour rééquilibrer l’Europe vers plus de démocratie et de social, «il faut s’appuyer sur la force de l’adversaire». Si des traités imposant davantage d’austérité aux économies européennes - comme le Pacte de stabilité de 2012 - ont pu être ratifiés, c’est qu’un accord pour une démocratisation peut lui aussi être trouvé. Cela prouve également que le droit n’est pas, par essence, conservateur, il peut aussi être progressiste.

    Le «T-Dem» crée de toutes pièces une Assemblée de la zone euro aux pouvoirs imposants (lire page 4). Son principe est de ne rien enlever à l’architecture européenne actuelle, mais d’ajouter. Rien n’empêche en effet dans le droit, expliquent les universitaires, d’insérer à l’existant d’autres structures, tant qu’elles ne viennent rien retirer aux institutions consacrées par les traités précédents… «Nous n’avons pas la prétention d’avoir atteint la perfection juridique : le droit n’a rien à voir avec les mathématiques, il ne se vérifie jamais en "vrai" ou "faux", c’est un terrain de jeu infini, prévient Stéphanie Hennette-Vauchez. Le T-Dem est de l’ordre de la proposition. Maintenant, il y a quelque chose sur la table, discutons-en.»

    C’est chose faite. Depuis sa présentation par le candidat Hamon, le 10 mars, ce texte a suscité débats et critiques. Beau projet, affirme le commissaire européen Pierre Moscovici, mais irréaliste : lui préfère renforcer le rôle de la Commission en créant un commissaire ministre des Finances de la zone euro, responsable devant le Parlement. «Utopie, pour ne pas dire ineptie», dénoncent l’ancien homme politique centriste Jean-Louis Bourlanges et l’économiste Elie Cohen sur le site du think tank Telos. Rien ne sert de créer un nouveau petit parlement, mieux vaut «transférer à l’Union des responsabilités précises en matière d’harmonisation fiscale et de politique conjoncturelle». «La seule vraie nouveauté, concluent-ils rudement, est que le PS, naguère le plus européen des partis français, a sous-traité cette opération à un intellectuel peu versé dans ces matières.» Pour Jacques Généreux, conseil de Jean-Luc Mélenchon, ce T-Dem est «une bonne et vieille revendication de la gauche», mais «juste un beau rêve». Lui prône plutôt une désobéissance aux traités (lire pages 6-7).

    Ambition

    Tiré à 20 000 exemplaires, livré en librairies mercredi, le traité de Piketty est aussi un coup éditorial. Fabriqué et mis en vente en dix jours par le Seuil. «C’est un projet destiné au débat public, qui ouvre des perspectives intellectuelles et politiques à gauche», explique l’éditrice Séverine Nikel. Un engagement qui correspond à l’identité de la maison : elle a sorti en janvier Histoire mondiale de la France, emmené par une autre tête de pont universitaire, l’historien Patrick Boucheron. Les deux ouvrages participent de la même ambition : face à la déferlante populiste et au délitement démocratique, les chercheurs en sciences sociales ont leur mot à dire. Histoire mondiale de la France s’est écoulé à 80 000 exemplaires. Joli score. Maintenant, il faut «vendre» le Piketty. La maison mise sur le nom de l’économiste, écrit en gros sur le bandeau de couverture. Des traductions sont déjà prévues en Allemagne, en Italie, en Espagne, en Grèce, au Portugal, en Turquie, au Brésil… Mais ce traité passera-t-il la présidentielle ?

    Sonya Faure , Cécile Daumas photo Diego Ravier (Hans Lucas)
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